la dernière semaine a le goût de l'utopie sur les lèvres. la signature de son nouveau contrat à l'horizon records qui soulève un énorme poids sur les épaules ; le remplace uniquement par un autre qui semble plus léger, sans doute parce qu'il l'a porté dans le passé, avec une certaine fierté. il y a quelque chose de réconfortant à reprendre les responsabilités d'un artiste, de retrouver la liberté et le poids de créer. c'est bien tout ce qu'il désire -- n'a jamais eu la prétention de vouloir plus, de rechercher la célébrité et la renommée. naivement, à croire que son art puisse s'élever et que lui pourrait demeurer inconnu... jusqu'à le vivre, par un coup du destin. voix et mélodies arrachées, volées par un autre lui feront réaliser que c'est impossible ; qu'il ne peut faire connaître ses mélodies sans y être intrinsèquement lié, sous l'œil jugeur du grand public. paradoxe auquel il n'a toujours pas de réponse, qu'il s'imagine avoir le temps de découvrir sous la direction de sa nouvelle compagnie.

encore en tête sa performance au festival grand mint ; à se montrer, tout en simplicité devant les autres pour la première fois depuis longtemps. l'énergie créative autrefois aspirée par ses journées de travail qui lui semble être infinie ; elle mène ses pas jusqu'aux locaux d'horizon records afin d'y inaugurer les studios pour la première fois - anticipation de voir ce qu'ils y cachent. il ne fait pas attention plus que ça, ouvre la première porte qui semble être libre... pour qu'elle ne le soit pas. oh, i'm sorry. i thought the room was empty. sa main libre se glisse dans son cou dans un signe d'embarras. un pied à l'intérieur, un pied à l'extérieur, sans trop savoir quoi faire. uh.. i'm yaoling, i mean, noeul. i just signed with the company so we'll probably meet again. les phalanges qui quittent le cou pour s'élever dans le vide dans un salut maladroit alors qu'il hésite à refermer la porte afin de lui rendre sa quiétude.

il y a des jours où nara semble tenir plus du décor que de la personne. on la dérange rarement quand elle s'enferme dans un des studios de l'agence. elle n'est pas étouffée de travail mais se demande si ça avait été une bonne chose à faire. c'était un sentiment de culpabilité assez gênant mais qui ne la tuait pas réellement.

elle fredonnait des airs, les pensant nouveau avant de comprendre qu'ils venaient déjà de certaines chansons écoutées plus tôt, balaye le souvenir de son esprit et recommence de zéro. son talon tape dans un rythme régulier contre le sol, l'esprit embrouillé, son dos s'affale contre son siège. elle s'autorise une pause de quelques minutes à peine, retire enfin le casque de ses oreilles, et à cet instant même,
la porte s'ouvre. ça la surprend un peu, elle pense d'abord que c'est pour elle, mais le visage pas réellement familier au début la garde dans ses questions.

— oh.. don't worry ! i'm leaving soon, i can't work here. elle souffle dans un sourire avant de se lever. sa pause se transforme en abandon, ça ne la dérange pas. — oh my god, i love your songs ! i knew you'll sign here but i didn't know when you'll come.. nice to meet you, i'm nara ! or nara as you want. elle lui prend dans une délicatesse sa main, qui témoigne de la politesse des premiers moments. nara n'est pas habituellement si douce, mais préfère le mettre à l'aise. — so, you need the studio ?

curiosité simple, nara se demandait s'il comptait juste visiter, ou déjà y travailler. pour elle, ça ne lui réussit pas aujourd'hui, alors elle lui cédait volontiers.

dans son embarras, il n'avait pas réellement eu le temps de regarder qui avait été victime de sa maladresse. les traits qu'il rencontre laissent un arrière-goût de déjà vu sur sa langue. il ne s'y attarde pas plus que ça, après tout, tous les artistes du label ayant sans doute déjà effleuré ses prunelles un jour ou un autre. gamin possiblement trop solitaire, trop privé pour reconnaître les gens de son industrie comme il le devrait. sa plus grande faiblesse, il en avait conscience -- le pouvoir des connexions y régnant, comme partout ailleurs. la poupée qui se lève, annonce son départ ; et il a l'impression de la chasser quand bien même ça n'ait jamais été son intention. oh no, please... mais le tout qui est interrompu par la suite. wait, did you say nana? le nom qui réveille un souvenir, un passé qui glisse jusqu'au bout de la langue sans pourtant accepter de tomber. assez près pour en connaître l'existence, mais pas assez pour en distinguer les détails. ça tourne en tête un instant, à se rejouer des fragments en express pour trouver le bon. i enjoyed 'don't come back' a lot! les fils s'étant connectés, à moitié ; mémoire incomplète qui continue de chatouiller le fond de l'encéphale sans se dévoiler. poignée de main qui semble sceller la rencontre, noyé les questionnements dans l'immédiat.

oh, no, not at all. I was just trying to see what was in the studios. simple touriste pris en flagrant délit ; à se faire nuisance dans le travail des autres. if you still have work I'll go, I don't want to disturb. à exister dans le cadre de porte, prêt à fuir à la moindre indication ; s'efforce cependant de rester, d'essayer de découvrir ceux qui partagent la même enseigne -- désir peut-être un peu égoiste de voir s'il pourra y découvrir des âmes semblables, des collaborateur.trices pour ses chansons futures peut-être. là était toute la beauté d'appartenir à un label.

Dans son sourire, il n'y a pas la nostalgie des anciens échanges, quand on rêvait de tout mais qu'on était encore minuscules. Nara ne diffère pas des autres et vit encore dans cette mascarade où elle pense qu'elle a discuté de ses envies d'adolescente, qu'elle a composé avec un autre. Alors celui en face d'elle, elle ne le connaît que grâce à son succès montant.

— Really ? Thank you !

Dans son sourire, Nara s'évite de trop penser. Il y a de cette pression naturelle, celle qu'on s'impose à soi-même. Depuis qu'elle est ici, rien ne semble convenir de ce qu'elle créé. Elle n'est satisfaite de pas grand chose et se demande si elle doit changer quelque chose. Alors le compliment lui va droit au coeur, mais impose également un malaise qu'elle garde pour elle.

— Oh no, don't worry ! You weren't disturbing me. Actually, I wasn't managing to work on anything soo.. I'll take a break I guess !

Elle avoue dans un léger sourire qui cachait une frustration de ne pas bien faire depuis des mois.

— But here's the studio I guess ! All of the studios look pretty much the same, some of them are bigger tho.

Elle précise, se tournant vers ses affaires pour commencer à les récupérer.