Couloirs bruyants de la KBS station, toujours peuplé de ce monde que Dain idolâtre. La période de promotions vient bientôt à toucher à sa fin, mais l’esprit juvénile n’est pas encore prêt à renoncer à ces interactions privilégiées, s’enivrant du contact des astres plus scintillants qu’elle pour mieux s’y noyer. Les expressions de son visage sont étudiées au millimètre près, tout comme sa démarche qu’elle a révisé des centaines de fois devant le miroir des salles d’entraînement : toute son apparence est calquée sur les modèles qu’elle érige en déités, nymphes inaccessibles qui nourrissent tout un imaginaire fantasmé. Elle en dérobe des codes, des mimiques, des habitudes qui ne sont pas siennes naturellement mais que l’esprit finit par assimiler à force de répétitions forcées, brouillant la frontière entre son identité supposée et la vacuité de ce qu’il en est vraiment. Ses talons ne font aucun bruit sur le sol du couloir, bien trop creuse pour subir la gravité. Son téléphone agrippé à sa main, elle tente d’arrêter toustes celleux croisant son chemin pour leur proposer de filmer des vidéos, invitations plus ou moins poliment déclinées - qui a le temps de s’embêter avec une rookie insignifiante quand la journée marque bientôt sa fin et offre un semblant de liberté ? Pourtant elle n’en démord pas, Dain. Son sourire toujours inscrit sur le visage, taillé à coups de couteau pour y rester malgré les déceptions, elle continue son cirque jusqu’à enfin reconnaître un visage familier - adoré. Hana unniiiiiiie !! Et elle s’élance en sautillant en direction de l’idol aperçue, bien décidée à réussir à passer un moment avec elle coûte que coûte. Ses bras s’agrippent automatiquement autour du sien, prenant le soin de l’empêcher de partir avec autant son corps que ses paroles. Je suis trop contente de te voir ici ! Dis, tu voudrais bien filmer un challenge TikTok avec moi ? Tu pourrais m’apprendre une partie de la chorée de Room Shaker, elle est vraiment trop bien… Lui demande-t-elle, l’expression suppliante comme elle a si bien appris à le faire autant avec ses camarades de kupid qu’avec ses grands frères, trop habituée à ce qu’on ne lui refuse rien pour ne serait-ce qu’envisager l’échec. Et après, on pourrait prendre des photos ensemble !! Je changerai direct mon fond d’écran ! S’exclame-t-elle, avant seulement de réaliser son niveau d’énergie bien trop élevé - presque étouffant - en comparaison de l’idol. Se reprenant aussitôt, son visage retrouve une expression plus composée sans réussir à pleinement contenir son enthousiasme, et si ses bras restent fermement agrippés à elle, tout son corps se meut pour tenter d’imiter la posture d’Hana et en exhiber les miettes du même charisme.
atmosphère familière alors que les hommes et les femmes parcouraient les couloirs de l’immeuble. à la fois affairés, pressés, épuisés pour certains, dans cete grande danse qu’était le monde de l’entertenment. véritable fourmilière qui ne dormait jamais, ou très peu, pour faire briller dans les yeux de milliers d’ères des étoiles qui ne devaient s’éteindre sous aucun prétexte. elle qui se tenait alors à un sommet culminant de ce monde en effervescence ne pouvait que comprendre ce que toutes ces personnes ressentaient parfois, prise entre deux feux alors que le jour déclinait derrière les grands buildings. et Hana continuait à danser, chanter, jouer les artistes affirmés pour les beaux yeux de ces fans qui ne lâchaient jamais leurs écrans, commentant chacune de ses paroles, chacun de ses gestes. et ne faire aucun faux pas, aucune fausse note, pour qu’ils continuent à l’aimer. pour toujours et à jamais.
ne pas montrer l’épuisement, la lassitude. continuer de sourire, répondre aux questions et demandes. elle faisait de son mieux pour être celle qui du haut de ses sphères, était tout de même accessible et adorable, ne montrant rien de la fatigue qui harassait son corps tout entier. rentrer et ne plus bouger, l’espace de quelques heures, avant que la machine ne l’rappelle à ses bons soins pour reprendre la danse à une cadence folle. la brune cherchait tout de même à s’exfiltrer de cette usine à gaz, une fuite stratégique qui fut avortée de la pire des manières. il lui fallut quelques secondes pour comprendre ce qui se passait réellement, un tel engouement ne lui était offert d’ordinaire que par la douce Bada qu’elle n’avait pas vu depuis des jours. et pas par une novice dont elle se souvenait à peine le nom. “ Alors, si déjà tu pouvais me lâcher, que l’on puisse en discuter tranquillement. ” à repousser la jeune artiste avec la douceur d’une aînée, ne voulant pas la brusquer bien qu’Hana aurait bien voulu la repousser avec une tractopelle. elle fit tout de même bonne figure, se montrant indulgente ne serait que bénéfique pour elle. “ Je veux bien te montrer la chorégraphie. Faire le refrain sera très bien pour un TikTok. Tu en penses quoi ? ” un sourire doux offert à la gamine qui lui faisait face, bien trop fan de sa personne. cela n’allait pas être de tout repos pour se la sortir des pattes. “ On pourra faire des photos après si tu y tiens. Mais je t’avoue que je dois faire vite, j’ai un emploi du temps serré aujourd’hui. ” une moue sur les lèvres pour montrer son désarroi et faire comprendre à cette enfant que le temps lui était compté et qu’elle n’avait pas des heures à lui accorder.
Les étoiles dansent dans les yeux de Dain alors que l’idol adorée ose enfin poser ses yeux sur elle - sûrement forcée par sa poigne autour de son bras et les aigus de ses exclamations frôlant l’insupportable. Son esprit ignore délibérément le ton tout sauf ravi qu’Hana emploie avec elle, se régalant simplement d’être ainsi reconnue dans l’univers de la star. Elle se laisse gentiment se faire repoussée, le sourire toujours collé aux lèvres, buvant les paroles de l’aînée comme s’il s’agissait du plus délicieux des nectars. Oui - oui - oui, confirme-t-elle en hochant la tête comme si celle-ci était accrochée à son cou avec un ressort, alors que déjà son corps revient à la charge pour se rapprocher un peu plus de la supernova. Ce serait par-fait ! S’exclame-t-elle en sautillant de plus belle, et passant royalement sous silence l’avertissement qu’Hana lui fait. Je connais déjà un peu la chorée, en plus, je l’ai déjà au moins regardé dix ou vingt fois, une fois même pendant un live de kupid ! Je suis sûre qu’un challenge fera troooop plaisir à mes fans - ce sont les cherubs, tu connais, t’as déjà entendu ? Moi en tout cas, je répète tout le temps que je suis la fan number one de Venus… Et elle débite les mots à toute vitesse, sans prendre de pause pour respirer, comme si elle sentait le temps compté pour cette interaction. Ses mains s’agitent pour tâter son costume, ô combien inconfortable et pourtant le seul à maintenir son identité volage en cage, avant de brandir son téléphone avec un cri de triomphe. Ah, voilà ! Mais elle est bien trop précipitée, tout son corps trop crispé à tenter de se contorsionner aux milles attentes posées sur ses épaules, et dans son geste trop enthousiaste le téléphone lui échappe des mains et s’éclate au sol - BAM. Oh non. Oh non non non… Réagit-elle aussitôt en se jetant au sol, ignorant le second bam! que font ses genoux contre le froid du linoléum pour saisir le téléphone et passer ses doigts sur l’écran fissuré. Dain retient ses larmes comme un enfant dont l’on vient de casser le jouet préféré, moins attristée par la perspective d’avoir à changer son écran - elle se fiche bien de la valeur de l’argent - que de perdre ce précieux temps avec son idol. Au bout de quelques secondes, elle finit par lâcher un petit glapissement en voyant l’écran s’allumer péniblement sous les craquelures, et vite le montrer à Hana en guise de preuve de sa bonne foi. Ouf !!! Pendant un instant j’ai cru que c’en était fini - mais non, il marche quand même ! Alors, tu me montres les pas ? Promis, je suis bonne danseuse ! Ment-elle effrontément, quand elle est celle qui a le plus de mal à retenir les chorégraphies au sein du groupe du fait de son court entraînement, mais si cela peut lui permettre de se faire bien voir aux yeux de son aînée, elle le fait sans hésiter. Qu’est-ce qu’un mensonge ou deux après tout, quand tout ce qu’elle est n’est qu’un amas d’artifices ?
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